Arrêt sur images – scène finale du film In the mood for love

Still words

 

De temps en temps je me baladerai, dans ce blog, sur d’autres sentiers que les chemins littéraires. Cette fois-ci j’arpente les allées d’un film qui avait marqué les esprits lors de sa sortie en 2000, avec un arrêt sur sa dernière scène, d’une beauté poignante.

Une scène toute en retenue, comme l’est le film entier : dans le silence à peine troublé par le vent, un temple cambodgien, le ciel, un moine bouddhiste, des jeux de lumière éblouissants.
Un trou, dans la pierre du temple, est filmé comme la bouche immobile d’un masque de théâtre grec antique. Un homme s’approche, place ses mains contre le trou de pierre et parle longtemps … Confidences muettes, couvertes par une musique au violoncelle. L’homme repart. De longs travellings englobent la beauté immuable du paysage indifférent. On revoit le trou, cette fois bouché par un peu d’herbe, dérisoire serrure.

Durant le film, l’homme avait expliqué à la femme qu’il aimait la tradition suivante : autrefois, pour préserver un secret, les gens allaient dans la montagne, creusaient un trou dans un arbre, disaient ce qu’ils avaient sur le coeur et scellaient leurs paroles à jamais en bouchant le trou avec de la terre.

Avec cette scène finale, allégorie poétique de l’incommunicabilité, Wong Kar Wai achève une œuvre à la grande beauté formelle, qui magnifie une histoire triste. Une histoire plus rêvée que vécue, dont il ne reste comme unique trace qu’un murmure, chuchoté à la pierre d’Angkor Vat.

 

Arriver à réaliser une scène pareille, aussi simple, dépouillée et émouvante, est la preuve d’une grande maîtrise de son art. Au tournant du siècle, le réalisateur hongkongais était au sommet de ses capacités et le prouvait magistralement.